Roland de Mecquenem - Archives de Suse

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Cote conservation : F/17/17256 / Document original conservé aux Archives Nationales, Paris.

FOUILLES DE SUSE
CAMPAGNE 1931

RAPPORT DE MISSION

( pl.I )

Les fouilles ont commencé le 14 Janvier 1931 et se sont terminées le 1er Avril. Le nombre de journées d’ouvriers utilisées a été de 39.000 ; le maximum de la main d’œuvre a été atteint le 23 Février avec 858 ; les équipes étant au nombre de 49, nous avions ce jour-là, 900 hommes sur le tell.

Les recherches ont porté sur les tells de l’Acropole, de la Ville Royale et dans les faubourgs.

I – ACROPOLE.

( pl.II )

Le sondage, près du château, qui avait atteint la saison précédente le sol naturel a été élargi et prolongé. Un puits manchonné de la IIIème dynastie d’Our avait l’année précédent été rencontré et vidé ; nous y avions recueilli grain à grain, un collier de pierres précieuses, d’environ 1m, 40 de longueur ; nous avons poursuivi ce travail sur environ cinq mètres de profondeur, par un puits latéral de plus d’un mètre carré en surface et qui servait en même temps à vérifier la coupe des couches inférieures ; nous n’y avons rencontré aucun objet et sommes arrivés très près du niveau hydrostatique ; dans le puits manchonné, nous avons (p2) trouvé un complément du collier d’environ 0m,50 ( pl.III ) ; deux éléments sont remarquables, petits lions en cornaline taillée et gravée. Nous avons encore trouvé deux cylindres, dont l’un en cornaline portait une inscription cunéiforme, nous confirmant dans nos attributions d’époque.

Notre plus important déblaiement a eu lieu entre le IIème et IIIème niveau. Nous avions été intrigués depuis deux saisons de trouver à une grande profondeur et au milieu de terrains archaïques des objets de basse époque et des débris mutilés plus anciens. Ce cas se produisait à l’extrémité de la tranchée vers l’intérieur du tell ; nous avons expliqué ce fait en supposant que nous avions rencontré le bord de l’ancien tell dans un ravin, correspondant à une ancienne rampe d’accès. La prolongation de la tranchée obtenue cette saison nous a montré qu’il s’agissait d’une grande fosse creusée dans les niveaux anciens ; elle était rectangulaire et orientée à peu près perpendiculairement à la tranchée, environ vers le Nord est. La largeur fut reconnue entièrement de 7m, 35 entre les parements de briques crues, avec intercalations de parties en briques cuites. La paroi du côté nord comportait un massif de briques cuites, d’une épaisseur de 2m, 25, de 4m,40 de hauteur, dont la longueur de 8 mètres au sommet diminuait en descendant jusqu’à 4m, 50 de longueur à la base. Nous avons reconnu le mur perpendiculaire sur une longueur de 10m, 25 sans rencontrer encore la fin de la fosse. Dans les déblais, nous avons trouvé une tombe sassanide, avec bracelet de verre et petit objet en fer ; des fragments de cornes et oreilles des taureaux en pierre formant chapiteaux des colonnes de l’Apadana ; des débris de vases en arragonite ( pl.IV,2 ) , quelques-uns portant (p3) inscriptions en trois ou quatre langues des rois achéménides : Xerxès, Artaxerxès. Avec quelques pointes de flèches de la même époque, nous avons à citer deux écailles d’armure en cuivre. Dans le massif de briques cuites, nous avons recueilli des perles de cornaline et noté des briques inscrites du moyen âge élamite. Nous pensons que cette fosse avait été creusée à l’époque élamite pour l’alimentation en eau des temples ; elle était remplie au moyen d’une machine, ou par des eaux de pluie. Cette fosse n’a été comblée que peu à peu, jusqu’aux Sassanides.

En dehors de la fosse, la coupe des terrains a été régulière, mais nous avons fait peu de trouvailles ; au-dessous de la poterie du IIème style ; cratères à quatre boutons et vases à bec tourné vers le bas, nous avons eu les écuelles grossières, les bols à manche percé, les cruches à anses torsadées du niveau intermédiaire entre Suse II et Suse I ; il nous a semblé que certains spécimens rencontrés profondément pourraient appartenir à une nouvelle division, mais les échantillons ne sont pas encore suffisants pour définir une nouvelle céramique. Nous avons recueilli quelques vases de pierre, parfois de marbre et des cachets plats gravés.

Au-dessous, nous avons atteint les fragments de vases peints de Suse I ; nous avons pu reconstituer un gobelet décoré de trois serpents venimeux dressés ( pl.IV,1 ) ; nous avons déblayé plusieurs fours et chambres à feu de four de la poterie peinte. Jusqu’au fond du chantier, les fragments de poterie rouge, sans décor, que nous connaissons de la tranchée Morgan supérieurs à la poterie peinte, étaient mélangés avec elle. Il ne s’agit naturellement pas de la céramique rouge que l’on trouve avec Suse II ou un peu inférieure , mais d’une pâte très cuite, et comme vernissée, qui (p.4) trouve un équivalent, mais alors nettement tourné, dans les niveaux tout à fait supérieurs des Suse ; peut-être achéménides.

Nous avons trouvé dans la partie inférieure de notre ouvrage, des fragments de silex et d’obsidienne, des figurines de petits animaux en terre cuite, des boutons cachets gravés ; et des instruments en os. Le sol naturel a été atteint à la même profondeur que l’année précédente.

Aux abords du chantier, les ouvriers faisant du mortier pour les maçons ont trouvé un fragment de buste de statue archaïque ( pl.V ) en roche micacée; les mains ont été mutilées, mais on se rend compte qu’elles étaient jointes selon la disposition rituelle, antérieure au XXème avt. J. C. Un poignet portait un bracelet ; la représentation était un peu plus petite que nature.

II- VILLE ROYALE.

Le chantier qui l’année précédente avait déblayé quelques ruines arabes, fut d’abord repris, sans autre résultat qu’un vase émaillé sassanide de moyenne grandeur ( pl.VI ) ; il était très lourd ; l’intérieur était bouché par un galet rond ; celui-ci enlevé, on apercevait des pièces de monnaie en argent, assez épaisses, plus épaisses que des monnaies arabes ou sassanides et grandes comme des tétradrachmes ; il fut impossible d’en sortir une seule ; les pièces étaient réunies par l’oxyde. Il était nécessaire de briser ou mieux de scier le vase, pour ensuite tenter de détacher les unités ; le contrôleur persan s’opposa à cette mesure et mit le vase sous scellés jusqu’à ce que l’on reçut des instructions de Téhéran. Ces instructions parvinrent négatives et nous ne savons pas encore ce que contient le vase.

Le chantier fut poussé en profondeur, mais rencontra un radier (p. 5) de graviers très étendu et épais, qui avec quelques pans de murs en briques crues , représentent les ruines d’un important édifice achéménide. Devant ce nouvel insuccès, nous avons transporté cette équipe, plus au centre de la ville, face à l’Apadana, dans une tranchée amorcée en 1914. Nous avons trouvé des ruines sassanides, avec poteries et figurines.

1ER SONDAGE ( plan )

Les déblais des déversoirs de l’année précédente menaçaient la route d’automobile de Nasseri, justement à peine refaite par les équipes des Ponts et Chaussées ; nous avons ouvert une nouvelle sortie plus au nord et à un niveau inférieur de deux mètres au précédent. Nous avons déblayé trois tombeaux voûtés élamites. L’un d’eux nous a fourni une grande gourde en terre cuite rouge peinte de cercles concentriques en noir et plusieurs têtes de terre crue ; nous n’avons pu en conserver qu’une seule, presque grandeur naturelle ; c’est une tête de femme ( pl.IX ) assez analogue à celle des figurines en terre cuite de la même époque : quelques tablettes inscrites, mal conservées et des exercices d’écriture et de numération sur de la terre crue ont été rencontrées.

Au-dessous se trouvaient des sarcophages et des jarres funéraires en terre cuite . Du mobilier, nous avons à signaler un petit pot avec peinture d’un serpent et un vase à décor incisé.

Nous avons trouvé dans ce chantier, un moule de fondeur en pierre tendre ( pl.VII ) , dont les deux parties portent sur chaque face des dessins en creux de pointes de flèches; des armes et des vases de métal, des cylindres cachets, des poids ; dans un puits arabe, un plein panier d’anses en verre ; de nombreuses figurines, dont la plus nouvelle pour nous est une petite tête d’enfant (terre cuite) ( pl.VIII ) . Sur le bord du tell, nous sommes descendus jusqu’au sol naturel ; (p6) Au-dessous du niveau des sarcophages, exploré l’année précédente, nous trouvons dans des fosses, des vases hauts de forme tronconique et à pied, que nous avions déjà rencontrés à l’Apadana, et attribués à la IIIème dynastie d’Our. Ici, quelques-uns ont un col un peu plus haut et comportent une anse ( pl.X ) , qui est plate ; la face extérieure est décorée de reliefs grossiers, représentant une figure anthropomorphique. Nous les rencontrons à Suse pour la première fois, bien que nous ayons trouvé des débris de ces anses, supposés être des devants ornés de petits chars en terre cuite ; ces vases sont au contraire connus depuis quelques années à Kish, et Mr Watelin avait attiré notre attention sur ces anses de Suse ; il les considère comme de la dynastie d’Agadé ; nous les trouvons au-dessous des sarcophages à moulures datés par les lentilles inscrites de la IIIème dynastie d’Our, très près des tombes d’enfants à même la terre, qui ont donné des tablettes du roi Ebarti. Le P. Scheil vient de publier une liste des rois de Simash et de Suse, comprenant 12 noms, Ebarti est le troisième ; cet étage de tombes nous paraît devoir être attribué à cette dynastie. Celui dont nous allons parler, parce qu’il est bien représenté dans cette fouille, se rapporterait à la dynastie antérieure des rois d’Awan, dont le P. Scheil vient de publier 12 noms également, et qu’il place comme en rapport avec la période d’Agadé. Il rappelle que Pouzour Chouchinak, le dernier de la série a été un des principaux souverains actifs de Suse. Nous ne trouvons cependant pas dans ce niveau de documents épigraphiques.

Les tombes sont comme les précédentes, dans des fosses rectangulaires de 1m. sur 2m. Le corps est allongé, couché sur le côté entre deux nattes ; le mobilier céramique est autour de la tête (p7) et allongé le long du corps ; les armes, les vases de pierre et de métal sont les mêmes que ceux des fosses supérieures, mais la céramique est très différente ; il y a des grandes marmites en terre cuite jaune, décorées d’une torsade sur la pente, et pourvues d’un petit appendice saillant au-dessous du col ; mais surtout des vases peints ( pl.XI ) , bols, bouteilles, cratères, parfois avec reliefs circulaires, et boutons percés pour la suspension funiculaire, longs vases à fond coniques. La peinture est monochrome, plus souvent polychrome, noir et rouge ; dans ce cas, elle est peu solide, reste adhérente à la terre qui l’entoure, ou part au nettoyage. Dans le niveau précédent, nous avions rencontré quelques écuelles à engobe rouge, sur laquelle était tracées des lignes brisées ; mais ici la poterie décorée est de règle, avec un décor souvent géométrique, mais aussi avec reproductions d’oiseaux, aigles et canards, de poissons. C’est le style II de Suse, mais dans une phase particulière, que nous avons dénommé Suse II bis sans que nous soyons encore bien sûrs qu’elle soit postérieure ; le véritable Suse II est pour nous représenté par le vase aux poissons, qui était accompagné de tout un mobilier, de vases d’albâtre et de cuivre, d’outils et de cylindres-cachets. Aussi, par des marmites rondes, à peinture solides et élégantes. Ces caractéristiques nous semblent à présent , pouvoir être plus évoluées que les vases peints actuels. Les vases de pierre, arragonite et gypse, sont de simples écuelles tronconiques ; les vases de cuivre ( pl.XIV ) , sont de formes savantes, flacons, bassins, marmites, parfois de grande taille, avec un très long bec ouvert ( pl.XII ) ; le batteur en cuivre paraît plus habile que le potier ; le métal est trop rongé en général pour que les objets puissent être conservés. Nous trouvons de petits nécessaires de toilette ; ce sont de petits cornets de cuivre faits d’une mince feuille (8) roulée ; à l’extrémité est une petite boule ; à l’intérieur est une paquet de quatre aiguilles reliées d’un bout par un anneau ; l’autre bout se termine en pointe, en palette aplatie ou creuse, ou forme de petites pinces à épiler ; il y a des miroirs ( pl.XIII ) : plaques circulaires de métal présentant une soie pour fixer un manche de bois ; sur une des faces, on observe des traces de nattes, indiquant que l’objet était monté dans un cadre, comme nos glaces à main.

Les armes offensives, sont des flèches, des javelines, des haches ( pl.XVII ) ; celles-ci sont à douilles, avec des taillants curvilignes ; on a retrouvé des types analogues, à Tépé Moussian et à Our, dans le Louristan et à Néhavend. Ce type était plutôt rare à Suse ; nous en avons cette année une dizaine d’exemplaires.

Une rencontre encore plus exceptionnelle est celle de boucliers ( pl.XVI,2 ) . Ils étaient en bois recouvert de cuir ; celui-ci était fixé sur le pourtour au moyen de clous en cuivre à tête conique et jointifs ; nous n’avons observé que la ligne de clous dessinant un ovale sur le terrain dégagé, dans un plan oblique à la tête du mort ; des traces fibreuses indiquaient le bois ; une matière brune, nous fit soupçonner le cuir ; la découverte d’une grande jarre sassanide, d’une outre racornie et aplatie de même apparence, nous confirma dans notre supposition ; le cuir, conservé longtemps dans certaines conditions prend un aspect qui peut le faire prendre pour du bitume. Une tige carrée, sortant de terre dans l’alignement avec le petit axe, ne pouvait être que l’âme d’une poignée ; elle était ployée pour se fixer dans le bois et était percée de deux clous. Sa courbure indique une épaisseur de bois et de cuir supérieure à 4 centimètres ! Le diamètre de la tête des clous est de 0m,025 à 0m, 03 ; le grand axe était de 0m,77 et le petit 0m,68. Cette arme devait peser une douzaine de kilos et offrir une protection efficace.

(p.9) Nous avons encore trouvé dans les tombes, des cylindres cachets, des colliers de perles en pâte, en pierres semi-précieuses, quartz, cornaline et des bracelets très oxydés en argent.

Au-dessous nous arrivons presque au niveau de la plaine ; nous atteignons bientôt le sol naturel sans rencontrer autre chose que quelques débris de poterie rouge.

2EME SONDAGE. ( plan )

1er Niveau - Nous avons reconnu quelques murs sassanides en briques crues, déblayé quelques tombes d’enfants, trouvé quelques cachets et quelques vases. Un aqueduc, à la base, qui la saison dernière fournissait quelques fragments de stèle en arragonite, a été suivi, et a donné quelques débris de la même pierre, mais sans inscriptions.

La profondeur de la tranchée a été augmentée de 2 mètres ; il a été trouvé quelques tombes néo-babyloniennes, avec vases émaillés ; il a été recueilli deux petites fioles en verre fondu polychrome ( pl.XVIII et XIX )

2ème Niveau. Des tombes néo-babyloniennes et de la fin de l’Elam à même la terre ont été déblayées ; il a été trouvé, des figurines, des perles en cornaline.

3ème Niveau. Quelques caveaux funéraires ont été déblayés sans apport intéressant ; nous avons recueilli quelques tablettes, des figurines, des amulettes.

Les sarcophages en terre cuite ont été rencontrés plus bas, fournissant quelques plateaux de balance et poids en hématite. Plusieurs figurines de terre cuite d’un type nouveau sont à signaler. Un petit vase en terre cuite contenait des objets en argent, qui avaient échappé à l’oxydation. Le plus important était une poignée de canne représentant le cou, orné d’une touffe de plumes et la tête d’un oiseau stylisé ( pl.XXI,1 ) ; une autre tête de masse ou de bâton était une simple boule aplatie ( pl.XXII,1 ) . Une dizaine de bracelets sont de simples anneaux ouverts (p.10), avec quelques traits gravés ; des anneaux unis ; quelques pendants d’oreilles, avec des logements pour sertir de petites pierres; des petits clous à quatre pans guillochés ; deux minces plaques, pliées sur elles-mêmes, portaient des représentations gravées ; il y avait encore des débris d’anneaux et de fils, de petits lingots fondus ; nous avons pu photographier les pièces principales ( pl.XXII,2 ) , mais sans pouvoir même faire un inventaire complet, le contrôleur persan ayant aussitôt mis le vase sous scellés.

Ce niveau a fourni quelques tablettes et lentilles inscrites ; une vingtaine de tablettes étaient particulièrement bien conservées, ayant été trouvées enfermées dans un vase.

4ème Niveau. Nous y avons trouvé des tombes dans des fosses rectangulaires de 1 mètre sur 2 ; l’orientation est sud-nord ou est-ouest ; le corps était allongé, couché sur le côté ; le mobilier de vases et d’armes ( pl.XXIII,1 ) , était réuni près de la tête et aligné le long du corps ; la céramique comprend les vases hauts à anse que nous avons signalés du 1er sondage et des vases généralement assez simples et lourds de formes ; il y a des vases de cuivre ; nous avons trouvé une passoire à manche ; les petits nécessaires de toilette déjà signalés ne sont pas rares, même dans les sépultures contenant des armes ; près d’eux sont des coquilles bivalves, contenant de la couleur, jaune et noir. Aux haches déjà citées s’ajoutent ici des lames minces de cuivre recourbées que nous avons interprétées comme des taillants pour des couteaux dont l’âme était en bois. Nous avons fréquemment rencontré des cylindre-cachets, mais généralement en calcaire tendre et très attaqués par les acides du sol ; nous avons recueilli dans ce chantier un fragment de statuette en gypse, très archaïque et portant au dos une inscription sumérienne, mais impossible à déchiffrer à cause de sa mauvaise conservation. Nous n’avons pas eu d’autres inscriptions (p.11) à ce niveau.

Divers :

En prolongement du chantier précédent :

1er Niveau- Un chantier travaillait en surface pour suivre des constructions arabes reconnues depuis deux saisons ; elles se sont arrêtées brusquement sans avoir fourni d’indications suffisantes ; dans les fondations, nous avons dégagé deux bases de colonnes, l’une aux faces verticales, surmontée d’un tore, est en calcaire blanc ; l’autre est circulaire avec des ornements achéménides ; elle est en diorite et ses proportions élancées font penser qu’elle a été sculptée dans un ancien monument. Au-dessous du niveau arabe, nous avons trouvé l’étage sassanide épais de quatre mètres, signalés par des têtes de puits des tombes d’enfant ; nous avons rencontré dans celles-ci des poupées en os, qui pour la première fois sont travaillées sur les deux faces ; nous avons trouvé quelques vases dans les terres et en particulier, une collection de 50 lampes en terre cuite. Nous avons enfin recueilli un fragment important d’une stèle achéménide ; il porte une inscription assez mutilée sur deux de ses faces. Le P. Scheil y a reconnu une version anzanite de la stèle de fondation du palais de l’Apadana.

2ème Niveau - Nous avons déblayé quelques tombeaux et vases funéraires élamites et trouvé des vases sassanides dans des puits.

Bord Sud-Est du tell

Trois équipes de pelleteurs, ont dégagé dans un ancien ravin des constructions arabes, parthes et sassanides ; ils ont trouvé de grandes jarres, de la poterie, quelques figurines et des pièces de monnaie dont un petit lot de pièces d’Alexandre en argent.

FOUILLES DU DONJON

( pl.XXIV )

Ce chantier a été un des plus importants de la saison, tant par le (p. 12) nombre des équipes employées que par les résultats. On se rappelle qu’à la fin de la saison précédente, nous avions trouvé une grande salle délimitée par des murs en briques crues, orientés sud-nord ; il y avait une entrée au nord et une autre à l’ouest ; elle paraissait avoir été à un certain moment, couverte par un plafond supporté par quatre colonnes ; nous avons fait des recherches en profondeur, au-dessous du niveau du pavé et constaté que la surface était divisée en petites chambres par des murs en briques crues ; nous pensons qu’il s’agit d’anciennes caves. A l’est de cette salle nous avons trouvé des restes de constructions en briques crues, ne se terminant pas ; au nord, sous le niveau des anciens pavés, nous avons trouvé des massifs de briques crues, séparés par des radiers pleins de gravier ; l’épaisseur de ces radiers varie de 0m,20 à 0m,40 ; d’après leur dessin sur le sol, ils doivent correspondrent à un parement des murs en briques crues ; ils tracent en effet, des couloirs, des entrées, des chambres ; ce qui ne se trahissait pas sur les dallages, dégagés antérieurement. Nous avons suivi plusieurs aqueducs parallèles aux façades des bâtiments ; nous n’avons cette année trouvé que très peu de briques émaillées dans leur déblaiement.

A l’Est de ces constructions, nous avons déblayé une surface très considérable présentant des dallages, des sols enduits de plâtre ; des entrées de portes. Une de ces portes était marquée par deux petites bases de colonnes achéménides ( pl.XXV,2 ) dont l’une portait une inscription trilingue de Xerxès ( pl.XXV,1 ) , déjà connue du reste par plusieurs exemplaires. Une sorte de vestibule était dallé en morceaux de marbre de réemploi ; il fut trouvé dans les joints de petits fragments d’inscriptions grecques. Il est difficile de comprendre le plan de l’édifice, mais il est probable que comme pour le premier, nous (p.13) pourrons le lire sur les fondations.

Un aqueduc sur la face orientale était construit avec de grosses pierres ; parmi celles-ci, plusieurs étaient intéressantes. Tout d’abord, une base de colonne achéménide, incomplète, portait une inscription trilingue d’Artaxerxès ( pl.XXXII,3 ) ; une dalle rectangulaire était sculptée sur ses faces verticales ; les bas reliefs étaient endommagés, mais on voyait cependant l’enceinte d’une ville avec ses tours et murs crénelés, une grande porte au milieu de chaque longue face ( pl.XXXIV,2 ) ; deux tronçons de colonne ( ?), portaient un graffito grec ; une partie importante de stèle achéménide était inscrite sur deux grandes faces ; inscription anzanite de Darius Ier.

Aux environs vers le Sud, furent déblayés d’autres restes d’édifices et l’on rencontre, dans les terres superficielles, un chapiteau de colonne de type nouveau, nettement achéménide ( pl.XXXII,2 ) . La table supérieure est carrée, au-dessous est une portion de fût circulaire, puis, entre deux rangées de perles, de gros bossages très saillants. Au-dessous de la deuxième rangée de perles, le fût est convexe et cannelé ; nous ne savons comment le profil rejoignait le fût de la colonne primitive.

Sur les dallages, nous avons recueilli deux fragments de statue en calcaire assez grossier ; celui-ci devait être primitivement recouvert de plâtre et peint. Une des statues est sans tête (pl.XXX) ; elle appartient à un personnage debout, pieds nus ; l’avant-bras droit est levé, la main ouverte, geste de bénédiction commun dans l’iconographie chrétienne.

Le costume est une tunique longue, et un manteau couvrant le dos et les épaules ; il est retenu par une écharpe, qui part de l’épaule gauche et revient à droite après avoir fait le tour du corps. La main gauche est fermée et un trou longitudinal suppose un objet maintenu par un clou sur le poing.

L’autre fragment est un buste sans tête ( pl.XXXI ) ; une écharpe était jetée (p.14) sur l’épaule gauche, la main droite est avancée et ouverte.

Nous citerons encore, de ce chantier, un fragment de bas-relief persépolitain ; une femme dont le voile revient sur le menton tient une sorte de drageoir, dont elle soulève d’une main le couvercle ( pl.XXXIII ) ; une personne analogue est en effet sculptée sur le mur de l’escalier du petit palais de Darius à Persépolis ; il n’y a donc pas à douter que le palais de Suse ne fût orné de lambris de pierre sculptée.

Nous avions pensé trouver sur le Donjon au-dessous des constructions sassanides reconnues d’abord, des ruines parthes, séleucides et enfin achéménides ; nous avons bien trouvé dans le déblaiement des matériaux des éléments de toutes ces époques, mais aucune assurance d’édifice ; bien plus, tous les matériaux achéménides réemployés proviennent de l’Apadana. Nos recherches en profondeur, ont retrouvé les jarres funéraires et les caveaux voûtés de la fin de l’Elam ; le Donjon était donc comme le bord Sud-ouest de la Ville une butte nécropole.

Avant de céder la place à Mr. Unvala, chargé d’exposer les résultats de ses fouilles dans les abords de Suse, nous résumerons rapidement l’Inventaire dressé en fin de saison, et qui comprend 518 numéros : 12 fragments d’inscriptions grecques, 3 fgts d’inscriptions élamites, 16 fragments d’inscriptions achéménides, 1 base de colonne et 5 fragments inscrits ; 8 fragts. de vases achéménides inscrits, un fragment de stèle égyptienne, un frgt. de statuette archaïque en gypse, 4 fragts. de statuettes en pierre, 2 frgts. de statue, 27 vases en pierre, 72 poids en pierre, 88 figurines, 135 cylindres et cachets plats ; 15 haches en cuivre, 12 poignards, 120 aiguilles, 10 outils divers, 28 flèches, 20 vases de métal, 40 colliers, 500 vases de terre cuite, 300 tablettes et fragments, 57 briques inscrites et frgts. 89 briques émaillées et frgts.

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