Roland de Mecquenem - Archives de Suse

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Cote conservation : F/17/17256 / Document original conservé aux Archives Nationales, Paris.

RAPPORT de MISSION
1929

Nous avons continué les sondages entrepris les années précédentes, sur les "tells" de l'Acropole et de la Ville Royale. Là, nous avons ouvert une nouvelle fouille sur le "Donjon", au bord du "tépé ".

Le Dr. Unvala a exploré les faubourgs de Suse, près de tépé Bouleuia, a travaillé sur la "Ville des Artisans", a fait quelques recherches sur l'Acropole.

Sondage de l'Acropole

Le fond du sondage de l'année dernière était comblé par suite des pluies, sur un mètre de profondeur. Pour faciliter la reprise du travail et descendre plus profondément, nous avons descendu de deux mètres le niveau de la voie ferrée. Pour rejoindre le palier correspondant le long de la tranchée, nous avons abattu environ six mètres de terrain au bout du chantier sur quatre mètre de hauteur. Le palier en question, une fois nettoyé des déblais, est apparu trop raviné pour l'utilisation ; des déblais sur le palier supérieur s'opposaient à l'élargissement. Nous avons dû reprendre la face de la tranchée située vis-à-vis, taillée verticalement à partir du III° niveau. Les résultats obtenus ont amené à une véritable exploitation du premier palier (34m de longueur, 11m50 de largeur, 3m40 de haut). Nous avons été ainsi retardés pour l'exploitation du niveau inférieur ; celui-ci de 1m. seulement plus bas que l'année précédente, est à 9m80 au-dessous du deuxième niveau, sur une largeur de près de 5m.

L'élargissement vers le Sud de la tranchée, dont nous avons parlé plus haut, nous a fait atteindre un ravin, qui séparait le tell de l'Acropole en deux. D'après notre coupe, cette division est postérieure aux vases peints du Ier style, dont elle n'affecte pas le niveau ; elle a rapidement disparu vers l'Ouest de la tranchée, s'est lentement atténuée vers l'est, laissant en dernier lieu une dépression (Ravin des Voleurs, Plan de l’Acropole, Mém. D.S.P. Tome I) qui nous paraît correspondre à une voie d'accès du haut du tell.

Fouille entre les IIe et IIIe niveaux.

1°- extrémité du chantier, Est

Les objets trouvés sont plus anciens que le IIe style ; ce sont des vases ronds en terre cuite, des écuelles grossières, des faucilles de même matière, des poinçons en os, des épingles et miroirs de cuivre, lames de silex et balles de fronde, des poids (?) (sic) assez importants en gypse, des cachets archaïques.

2° longueur du chantier

Vers l'Est, mêmes objets que plus haut ; vers l'Ouest, sur une longueur de 8m environ, nous constatons le remplissage du ravin ; à la partie supérieure, écuelle et gobelets en terre cuite ; ils ont les parois tellement fines que nous les avons d'abord crus archaïques, une corne de taureau en pierre, provenant des chapiteaux de l'Apadana, un col de vase en aragonite ( pl.II,2 ) portant une inscription de Xerxès en quatre langues, de nombreux fragments, disséminés dans la terre, d'une marqueterie en os : nous avons (p. 2) reconnu une suite de petites fleurs sculptées en bas relief, des ornements gravés au trait, d'époque achéménide ; des briques émaillées élamites, un fragment de couvercle de vase émaillée à relief de même époque ; quelques fragments de briques inscrites ont été remarquées dans un pan de mur de 4 m de longueur, 0m60 de largeur et 1m50 de hauteur ; un poids en une sorte de tuf avait grossièrement la forme d'un canard ; deux fragments de statues étaient en roche éruptive ; l'un ne porte qu'un tronçon de cordon en saillie ; l'autre en pierre en pierre noir-bleu, semble un angle supérieur de socle ou de siège ( pl.I ) ; il montre sur deux faces, l'amorce de bas-reliefs, sans doute suites de guerriers ; d'une part nous avons le buste du premier individu d'une file. La tête, de profil, est bien conservée : les cheveux retenus sur le front par un bandeau sont réunis en arrière en un long chignon replié sur lui-même. La barbe descend jusqu'à l'épaule ; l'oeil est représenté de face ; l'oreille est dessinée trop haute. Le nez est droit, la lèvre supérieure est saillante, la bouche sourit avec fierté. Le buste est de face ; l'épaule, la poitrine, le sein droit sont découverts ; le côté gauche est vêtu d'une peau de mouton, laine en dehors, retenue par des courroies. Le bras droit demi-raidi est conservé jusqu'au poignet. Le personnage de l'autre face, dernier de son rang, est encore un guerrier analogue. Le vêtement paraît avoir été différent, les bras sont mutilés. Nous avons pensé que ce fragment pouvait appartenir à une statue de Naram-Sin, dont nous avons trouvé dans les mêmes parages plusieurs débris présumés, mains jointes, et pieds. Il était possible de retrouver d'autres pièces sur ce point et nous avons tenté cette chance en prolongeant cette fouille.

Au-dessous, nous avons recueilli deux morceaux de tablettes proto-élamites, des vases de terre cuite.

Descente en profondeur.

D'abord, nombreuses écuelles grossières, clous, balles de fronde, bobines ou pesons, figurines d'animaux en terre cuite, puis vase rond à engobe rouge, à 7m50 au-dessous du IIe niveau ; vase à peintures noires, trop fragmenté pour l'attribuer nettement au Ier style, il était entier et en place. Nous avons encore noté de nombreux fragments de céramique du IIe et Ier Styles, un long fil de cuivre, probablement anse de vase, un gros marteau en pierre calcaire.

Plus bas, fragments de vases peints, lames de silex et d'obsidienne, une hache grossière à poignée, de gros galets allongés qui montrent sur la moitié de leur longueur des traces de bitume ; cela prouve leur utilisation comme marteaux ; des percuteurs. Nous avons déblayé des soles de four et des fonds de bassins en terre recouverte de bitume.

À la base de la fouille : petit vase peint en forme de cornet ; pierres-outils ; broyeurs à grains, petite soucoupe de pierre et nombreux débris de vases peints.

Nous n'avons en aucune façon l'impression d'être dans une couche très primitive ; nous sommes du reste à 2m. au-dessus du niveau de la nécropole du Ier style. Malgré le retard des travaux d'approche, nous aurions atteint cette profondeur sans l'arrivée des contrôleurs persans.

Fouilles à la Ville Royale

I- Bord ouest du tell :

Une voie de dégagement, amorcée l'année précédente a été prolongée, élargie. Elle a été poussée en profondeur jusqu'au niveau d'une fondation de graviers que nous supposions achéménide, par analogie avec la terrasse de graviers de l'Apadana. Nous avons rencontré sur ce lit de 0m60 d'épaisseur, un dallage et des massifs de briques crues ; mais, ils avaient la même orientation que les constructions supérieures qui sont arabes ; ces dernières comprenaient des chambres aux murs de briques crues avec revêtement de plâtre et dallage en carreaux de briques. Nous avons déblayé une façade de monument plus important, avec des fondations en briques cuites, deux piliers carrés supportant chacun une colonne cylindrique. Une porte sur le côté de ce péristyle était indiquée par une grande dalle.

Au bout de la tranchée, à 2m. de profondeur, se trouvaient des tombeaux babyloniens, avec mobilier de vases de terre cuite. Parmi les trouvailles, citons un petit débris d'inscription achéménide, un petit cheval en terre émaillée bleue, dont le cavalier était incomplet ; ce jouet était trois fois plus grand que ceux que nous rencontrons habituellement : époque sassanide.

II- Premier sondage :

L'ancienne fouille, agrandie, nous avons amorcé une tranchée à 2m. plus bas, ce qui porte la profondeur à 13 m de la surface. Les travaux assez réduits dans la couche superficielle ont rencontré le niveau arabe, recueilli quelques vases émaillés et dans les puits de la vaisselle de cette époque. La trouvaille la plus intéressante a été celle d'une grande auge de terre cuite (0m64 de diamètre). Elle contenait : cinq sceaux en terre crue, percés pour le passage du lien ; ils portaient l'empreinte de plusieurs cachets aux inscriptions pehlevies ; deux pièces d'argent à l'effigie de Kosroès I, une petite fusaïole ou tête d'épingle en os, ornée de dessins au trait, quelques objets en fer : égoine, lame de couteau, sorte de crochet, enfin les débris de deux sébiles en verre.

Le niveau intermédiaire (de -5m à -8m40) renfermait d'abord des tombes achéménides et néo-babyloniennes qui paraissent à même la terre ; leur mobilier dans cette fouille a toujours été particulièrement pauvre ; le mobilier ne comprenait que des vases de terre, des anneaux de rares colliers de perles de pâte. Les attitudes des morts sont très diverses ; un squelette était couché sur le dos et les os apparaissaient comme blanchis à la chaux. Une tombe contenait trois individus ; deux squelettes étaient étendus, l'un sur l'autre, tête bêche ; le troisième, au long, avait les bras en croix ; des vases attestaient que ce n'était pas un enfouissement fait à la hâte. Près du bord du tell, se pressaient les jarres des tombeaux d'enfants ; au milieu d'un groupe de cinq, une jarre était certainement trop petite pour avoir pu contenir le corps entier de l'adolescent dont nous reconnaissions le squelette, accompagné d'une épingle en os ; c'est un cas certains de réinhumation.

À l'autre extrémité de la tranchée nous avons suivi un long aqueduc en briques ; il aboutit à un dallage de constructions néo-babyloniennes. Nous avons étudié plusieurs fours de la même époque ( pl.IV,1 et 4 ) . Le plus grand montrait un massif de 5m. de longueur, de 2m. (p.4) de largeur, 1m70 de hauteur. À l'intérieur, on remarquait deux canalisations longitudinales, à chacune d'elle aboutissaient des carneaux verticaux. Nous n'avons pas déterminé la position des chambres de combustion. Deux fours étaient sur un plan triangulaire. Les autres étaient circulaires, de 0m90 de diamètre et de 1m de profondeur.

Au-dessous de ce niveau se trouvait un cimetière élamite ; de grandes jarres contenaient les restes d'adolescents, parfois accompagnés de mobilier ; en voici un exemple : les dimensions de la jarre étaient les suivantes, hauteur 1m., diamètre de l'ouverture 0m.90. Contenu : vase de terre cuite de 0m.25 de hauteur, une écuelle de 0m.20 d'ouverture, un bec de lampe, un fragment de côte de boeuf, des traces de bois, deux fragments de lames de silex, un râcloir, un éclat de silex, un galet peut-être utilisé comme polissoir, un autre taillé et poli en forme de coin, un troisième plus gros, probablement un percuteur.

Un sarcophage en terre cuite avait 1m.50 de long, 0m.60 de largeur, 0m.20 de profondeur. Il était fermé par un couvercle légèrement bombé vers le centre : il contenait trois squelettes sans mobilier.

À la base du niveau, nous avons déblayé une tombe, simple fosse, croyons nous, peut-être construction en briques crues. Nous avons remarqué deux crânes ; les ossements incomplets étaient posés sur une natte ; près d'une tête, se trouvait une coupe en cuivre qui renfermait un cylindre en hématite, monté en argent et quelque perles de pâte ; près de la deuxième gisaient un beau cylindre-cachet en agate, un oudja de même matière, trois débris de clinquant d'or, quelques perles de cornaline et trois vases de terre ; encore à noter quelques fragments de tablettes en terre crue.

À la même profondeur, nous avons eu plusieurs dépôts de tablettes inscrites, généralement en très mauvais état en raison de l'humidité du sol ; par chance, trois belles tablettes intactes ont été trouvées dans un vase de terre cuite du moyen âge élamite. Ce chantier a livré aussi quelques empreintes de sceaux sur bouchons de jarre en terre crue, un certain nombre de figurines. Nous avons déterminé que vers l'ouest du sondage, nous entrions de plus en plus dans un ancien tell et nous avons arrêté la progression vers l'est qui montrait un remplissage.

Sur la pente du tell, un peu à l'ouest de notre chantier, la pluie mit à découvert un sarcophage à moulures du XXIIe siècle avant notre ère ; il était très détérioré par les intempéries et par un puit de drainage qui l'avait traversé ; nous avons recueilli une écuelle et un fragment d'un plateau en bitume taillé à trois pieds rapportés, que nous savons avoir pu être très précieux ! Le sol correspondant à ce tombeau était à 5m environ au-dessus de la plaine. Des équipes ont été aussitôt sur ce point ; elles ont déblayé à ce niveau environ 10m de largeur sur 25m de longueur, en raison de la pente rapide du tell sur ce point la hauteur de la coupe terminée dépasse 6m. Il a bientôt été rencontré le fondations en briques crues du mur de l'enceinte achéménide ; elles étaient heureusement très affaiblie par l'érosion. Nous avons observé un niveau parthe, déterminé par de hautes jarres, placées verticalement pour maintenir les terres. Elles étaient en général brisées, contenaient parfois des os d'enfants, ce sont donc des jarres funéraires réutilisées. Nous avons à signaler de cette époque un fragment de petit bas-relief et une petite tête de femme à la coiffure égyptienne (p.5) en léger relief dans un naos, ces deux objets en terre cuite. À la base du niveau, nous avons déblayé plusieurs vases funéraires, et un sarcophage sans moulures (XXème siècle avant notre ère). Il était entouré de sébiles de cuivre, de petits vases et renfermait trois groupes d'ossements, séparés par deux fonds d'anciens sarcophages ; il est probable qu'il s'agit de sépultures successives.

Nous avons trouvé encore un dépôt de débris de pâte d'émail, d'objets en émail, ratés de fabrication, en particulier, la moitié d'une écuelle de faux lapis, un morceau de plaque de même matière ( pl.IV,2 ) , portant un graffito à l'encre, quatre caractères araméens, cet ensemble est probablement achéménide.

III- Deuxième sondage :

Côté ouest.

Niveau supérieur.

Il débute en ce point par une couche sassanide, épaisse de plus de trois mètres, comportant de murs en briques crues. Ils dessinent des chambres longues d'environ trois mètres et larges de deux. Elles contenaient quelques vases et gourdes, des jarres funéraires.

Au-dessous se trouvaient des tombes achéménides et néo-babyloniennes ; quelques-unes renfermaient un mobilier de vases émaillés, de vases en cuivre, des anneaux de cuivre et d'argent. Citons de ce chantier, des cylindres-cachets néo-babyloniens, un fragment de lapis avec base de petite oreille d'animal en relief et partie de cartouche royal. L'inscription se rapporte au roi cassite Bourna Bouriash ( pl.VII,4 ) .

Niveau moyen

À la partie supérieure, tombes néo-babyloniennes : notons un squelette couché dans une fosse, dont l'étroite ouverture était fermée par une ligne de briques crues et cuites ; des vases de terre cuite, une coupe et un vase de cuivre étaient disposés le long du corps. Nous avons trouvé une perle de lapis-lazuli. Dans un vase funéraire, avec des ossements d'enfant, se trouvait un poignard de cuivre, découpé dans une mince feuille de métal.

Au bord du tell, tête de puits de drainage sassanide ( pl.VII,2 ) et sarcophage de terre cuite à couvercle. La cuve était rectangulaire (1m.26 sur 0m.75) ; le couvercle était très bombé de sorte que la hauteur au centre était de 0m.63 ; à l'intérieur, des restes d'enfant.

Au-dessous, tombes élamites : des ossements d'adolescent se trouvaient sous un grand éclat de pot, maintenu à hauteur par des éclats plus petits. La mâchoire inférieure était placée dans un petit vase, de sorte qu'il est impossible de ne pas croire à une deuxième inhumation ; mobilier : lame de silex et anneau de bronze.

Une tombe d'adulte à même la terre, contenait un vase néo-babylonien, une pierre creusée, lampe ou godet, un petit disque de pierre ; la présence fréquente de disques dans les tombes fait penser à l'usage actuel des chiites, d'un petit disque analogue, rond et plat, qui, posé à terre devant eux, sert à préserver le front du contact de la poussière au moment des prosternations de prière ; ce caillou est souvent remplacé par un disque moulé en terre de Kerbèla.

Un vase funéraire (-8m.) contenait un fond de pot, des ossements d'enfant, une petite amulette de pierre noire, (croissant) et des os d'âne : tibia, métacarpien et omoplate ; une écuelle. À la base du niveau, près d'une jarre funéraire, un vase contenant (p. 6) une quinzaine de contrats, tablettes de terre crue en parfait état de conservation.

Dans ce chantier, nombreuses figurines de terre cuite élamites parmi lesquelles des petits musiciens ( pl.VII,1 ) ; ils jouent d'une sorte de banjo ; sur l'épaule de l'un d'eux, un petit enfant est grimpé sans doute un danseur ; deux exemplaires de poupées sont remarquables par leurs proportions élancées ; c'est le canon grec.

Niveau inférieur

Au sommet, nous trouvons deux lots de tablettes, près de vases funéraires ; deux tombeaux voûtés, en briques cuites, l'un à côté de l'autre ; le plus petit (0m.95 sur 1m.20, en plan) était rempli d'ossements sur 0m.40 de hauteur ; nous avons compté 20 crânes ; au milieu, se trouvait une tête en terre crue, presque grandeur nature ; la face était mutilée, la coiffure se rapporte à une femme, les cheveux sont indiqués et peints au bitume ; deux tresses parallèles viennent les maintenir. Deux anneaux de bronze ont été recueillis ainsi qu'un vase de terre cuite. L'autre tombeau (1m.70 sur 1m.40) contenait de nombreux ossements plus ou moins écrasés par des briques, indiquant une réfection du monument après le dernier ensevelissement. Dans les terres, ont été notés : un bracelet, une épingle de cuivre, un disque en pierre, une amulette croissant d'argent très oxydée, un percuteur, un fragment de poids ovoïde en pierre, une petite bouteille en terre cuite et deux autres semblables jumelées.

Non loin de ces monuments était un vase funéraire de 0m.60 de hauteur et 0m.43 d'ouverture, renfermant quelques os ; le crâne était à 0m30 au-dessus du haut du vase. Il faut qu'il ait été déposé là au moment d'une deuxième inhumation, ou que le corps placé dans le vase, la tête soit restée au dehors de la jarre et soit séparée des autres os par la terre pilée ou dans le processus de décomposition.

Plusieurs autres tombeaux construits ont été déblayés à ce niveau ; l'un d'eux contenait une tête féminine en terre crue ; il manque la partie supérieure et un peu d'un profil ; le puits d'accès d'un caveau renfermait les restes d'une tête analogue qui avait été dorée à la feuille.

Côté est

Niveau moyen

Tombeaux voûtés et jarres funéraires élamites. Le caveau le plus remarquable mesurait 2m.60 de long, 1m.55 de largeur et 1m.70 de hauteur, hors oeuvre, avec un puits d'accès latéral de 1m10 de côté. La voûte était blanchie à la chaux ; il contenait de nombreux ossements ; recueillis : quelques perles, bracelets, anneau, de petites bouteilles en terre noire, une tête d'homme barbu ( pl.XII,2 ) , les cheveux et la barbe peinte en noir, reposait sur un carreau du dallage ; le profil inférieur était écrasé ; celui qui reste est analogue à la tête trouvée deux ans auparavant ; c'était donc un objet de fréquente demande et exécuté en série et pas du tout un portrait en ronde-bosse. C'est la représentation d'un type moyen d’élamite et qui ne manque pas d'art ni d'expression. Dans le puits d'accès se trouvait ; un crâne, une bouteille en terre noire, un fragment de figurine.

Un peu au-dessous du sol du tombeau, nous avons déblayé des restes de construction, dallage, murs, … une sorte de grand bassin en terre enduite de chaux, présentant une rigole sur le pourtour. Il était rectangulaire, de 2m. sur 0m.70. Nous avons remarqué bien des fois au voisinage des tombeaux, des bassins, et cuvettes ; elles (p. 7) paraissent en rapport avec les sépultures et peuvent avoir servi à des cérémonies, purifications et sacrifices. En général ils sont de moindres dimensions. Autour du caveau étaient plusieurs tombes d'enfants. Quelques unes contenaient des astragales de mouton ou osselets. Ces jouets sont certainement les passe-temps des plus anciens de l'humanité. Nous les avons notés à Suse depuis le XXe siècle. Les indigènes du Khouzistan y jouent encore.

Niveau inférieur

En bordure du tell, tombeaux voûtés ; l'un d'eux, contenait avec de nombreux ossements, deux belles épingles de cuivre, un petit vase. À l'extrémité opposée, jarres funéraires et grands vases citernes, une sorte de petite cuve en terre et chaux, enduite de bitume renfermait des os d'adolescent, réinhumation certaine : la tête reposait sur un petit disque de pierre ; deux tombeaux voûtés. Nous avons eu de nombreuses figurines en terre cuite, ratés de fabrication et fragments, c'était probablement un atelier de cuisson.

Centre de la fouille

Le fond du sondage a été élargi et approfondi ; il mesurait en fin de travaux 26m. sur 20m., à la profondeur de 18m.

Nous avons déblayé de nombreux sarcophages en terre cuite ; à l'intérieur, près du squelette, on recueille : anneaux de chevilles, bracelets, bagues et pendants d'oreille, généralement en cuivre, un bracelet nous a paru porter traces d'un fil d'argent enroulé tout autour! Traces de diadèmes en clinquant d'argent sur le front, de pectoraux de même métal sur la poitrine ; une sébile en cuivre est rituelle ; parfois un cylindre-cachet, alors en bitume, avec invocation de Shamash, dieu solaire et de sa parèdre, Aa ; souvent des plateaux de balance en cuivre et des poids d'hématite, petits, ovoïdes allongés ou en forme de canard, ou simples petits cailloux ayant servi de poids. À l'extérieur, le long du sarcophage, sont en général de vases de terre : on trouve parfois à l'intérieur de traces du contenu primitif ; noyaux de dattes, graines, pépins de raisins ; une fois : des osselets. À l'époque de la IIIe dynastie d'Ur, la forme des vases est plus trapue et le col est coloré en rouge. On recueille des vases en cuivre, des armes, pointes de flèches et de javeline, poignards à soie et rivets, des outils, houe, scie, gouge, burin.

Près d'un sarcophage, nous notons, par exemple, six vases de terre, une coupe en cuivre, une coupe en bitume taillé (diamètre 0m.26) ( pl.XIII,2 ) dont le bord est orné de quatre plaquettes en coquille, fixées avec deux petits rivets de cuivre. À l'intérieur de la cuve, le squelette était trouvé, couché sur le côté, les jambes repliées, les os des mains plongeaient dans une sébile de cuivre ; près du crâne était une petite hache ; les os étaient recouverts d'une couche ocreuse provenant de la décomposition des suaires colorés ; il y avait plusieurs anneaux, une épingle de cuivre, deux fusaïoles en bitume. Cette tombe est antérieure au XXe siècle. Plus d'une fois nous avons constaté des tombes à même la terre, nous n'en avions pas rencontré auparavant à ce niveau. Ce sont surtout des tombes d'enfants, accompagnés de vases, les restes sont généralement sur des nattes. Près des os se trouvaient dans la terre de minuscules tablettes inscrites, miniatures de contrats, indiquant la sépulture des fils de négociants, moissonnés dans leur fleur.

Près d'un squelette d'adulte, à même la terre, semble-t-il, se trouvaient : une pointe de flèche en cuivre, une tête de canne, une douille, une pointe de javeline en cuivre ; près d'un autre squelette : (p. 8) trois vases de terre cuite en mauvais état, un vase en argent tout à fait aplati, une boucle d'oreille en électrum, une poignée de canne en cuivre, la dorure d'une poignée de canne (pl.XIII,1) ; une feuille d'or un peu plus épaisse, circulaire, avec un trou central, travaillé au repoussé ; le dessin comporte entre deux bandeaux en relief, des groupes de traits parallèles, légèrement flexués dont les obliquités sont de sens différents. Cet ornement rappelle celui qui est gravé sur le bandeau du casque en or de Mes-Kalamdug, trouvé à Ur et d'après Mr. Woolley, antérieur à 3200 avant notre ère. À Suse, nous ne sommes pas encore au niveau des rois d'Agadé, mais vers le 24e siècle seulement.

Ce chantier fournit de nombreuses figurines et petits objets, des tablettes inscrites. Nous sommes encore à cinq mètres au-dessus du niveau de la plaine ; quelques fragments de vases peints font croire que nous ne sommes pas loin du niveau des tombeaux d'Agadé ; nous pouvons encore espérer rencontrer les tombes immédiatement inférieures qui font encore défaut dans nos connaissances par ailleurs très incomplètes sur les modes d'inhumation à Suse. Là comme à l'Acropole il nous a manqué le huit jours de fouilles que nous espérions et que les contrôleurs persans nous ont fait sacrifier.

Ravin No. III.

Une ancienne amorce de tranchée, vieille de plusieurs campagnes a été reprise, pour faciliter par la suite, l'exploitation des terrains ouest du deuxième sondage, devenus trop élevés pour une coupe en une fois (12m.). Le prolongement de la tranchée en question permettra l'enlèvement des terrains superficiels.

À la partie supérieure, à fleur de sol, nous avons déblayé une construction arabe, avec dallages, bases de colonne en briques, au-dessous niveau sassanide très épais (6m.) où nous avons rencontré une tête de puits formée de neuf grandes jarres, calées d'un bout contre les parois du puits, inclinées l'une vers l'autre pour réunir leurs orifices, et soutenir ainsi une dalle percée destinée à l'écoulement des eaux ; les interstices entre les vases étaient bouchés avec des fragments de briques, des morceaux de mâche-fer, des éclats de pots ; on remblayait ensuite jusqu'au niveau du dallage. À citer, des jarres funéraires, des vases et des figurines.

Donjon

Sur le flanc du tell, très abrupt autour du donjon, les pluies firent apparaître de grandes jarres parthes aussitôt signalées par les gamins de cinq à huit ans, nos fournisseurs de pièces de monnaies de bronze. Une équipe envoyée pour le déblaiement trouva une longue ligne de jarres, puis deux autres, immédiatement au-dessous, et en arrière, une deuxième série de trois jarres superposées. Quelques-unes contenaient des ossements d'enfants ; nous nous rappelions que Dieulafoy, dans son exploration des remparts, avait rencontré des jarres sassanides qui remplissaient des sortes de chambres et probablement funéraires. Nous pensions avoir affaire à quelques chose de semblable ; mais, l'examen de la coupe démontra qu'il s'agissait d'une consolidation du sol ( pl.XIV,4 ) au-dessous d'une construction importante, établie très près du bord du tell. Les jarres remplies de terre et placées verticalement remplaçaient des pilots de bois! Quelques-unes purent être retirées entières. Notre équipe monta d'un cran, pour déblayer la construction supérieure ; elle suivit un mur où s'élevaient deux piliers carrés ( pl.XIV,2 ) , bases de colonnes. C'était le modèle ordinaire (p. 9) des édifices arabes ; nous en avons cependant poursuivi l'exploration, parce que parmi les matériaux, nous reconnaissions la présence de briques achéménides. Dans les tombes supérieures, se trouvaient des tombes du Xe siècle de notre ère ; l'une renfermait une boucle d'oreille, dont nous connaissions le style en ayant trouvé plusieurs dans le déblaiement du cimetière d'époque arabe de l'Apadana ; nous disons arabe et non point musulman car l'orientation des tombes était perpendiculaire à la direction rituelle. Les tombes actuelles sont orientées à peu près est ouest ; la tête du mort est tournée de côté de façon à regarder vers la Mecque. Les tombes de l'Apadana et celles du Donjon étaient orientées environ nord-sud. Un des squelettes présentait une particularité étonnante au premier abord ; le crâne et la plupart des os étaient colorés en rouge. On signale des colorations d'os dans les tombes quaternaires, mais ici, il ne s'agissait que de la décomposition du suaire, probablement toile épaisse fortement teinte en rouge d'oxyde de fer.

Le sol des chambres fut atteint, il était, soit de carreaux de briques, soit de terre battue, revêtue de chaux. Le mur déterminé d'abord fut dégagé ; en arrière des colonnes régnait un péristyle déblayé sur trois mètres. Il était dallé en grande partie de beaux carreaux achéménides. Ils appartenaient surtout au motif du griffon ailé ; d'autres à des ornements. Encastrés dans le dallage étaient plusieurs blocs de pierre. Une base de colonne carrée, surmontée d'un tore, en calcaire blanc, était retournée, face carrée au niveau du dallage ; un fragment d'une autre base en calcaire bitumineux, servait pour le gond de la porte ; une troisième aux faces rectangulaires, de même matière, montrait des traces de sculptures ( pl.XIV,1 ) ; on distingue en bas-relief, les pattes de derrière du griffon ailé et les tiges verticales fréquentes sur les monuments de Persépolis et les panneaux émaillés de Suse. Il n'est donc pas douteux que cet élément de bas-relief et achéménide. Il provient du palais de l'Apadana et par analogie avec l'emploi du même motif à Persépolis, nous pouvons en faire un élément de la décoration d'un escalier. Si nous ajoutons à cette découverte celle d'un fragment de pilastre, décoré de cannelures et d'une ligne de marguerites sculptées, nous sommes obligés d'abord de reconnaître que nous avons encore beaucoup à apprendre sur le palais susien, ensuite que celui-ci présentait beaucoup d'analogies avec ceux de Persépolis.

Sur le dallage nous avons recueilli une boucle d'oreille en argent doré, probablement sassanido-arabe.

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